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Une Quatrième Journée Vibrante et Engagée à la Semaine Scientifique

 

C’est dans une ambiance chargée d’émotion et d’une rare intensité que s’est ouverte, ce jeudi 15 mai, la quatrième journée de la Semaine Scientifique. Me Joseph Price Ducasse, visiblement touché, a ouvert les débats par une conférence poignante sur ce thème aussi sensible que fondamental : « Restitution et réparation : 200 ans après ! ». Il a lancé la réflexion par une affirmation percutante : la dette de l’indépendance représente un frein majeur au développement d’Haïti. À partir de là, il a posé une question centrale, mêlant droit et mémoire historique : comment articuler le principe de non-rétroactivité du droit avec les revendications de justice liées aux dettes historiques ?

Pour éclairer son propos, il a pris soin de définir les concepts juridiques essentiels, notamment celui du principe de non-rétroactivité. Ce principe, qu’il qualifie de pilier du droit, stipule que la loi ne dispose que pour l’avenir. Il est garant de la sécurité juridique, de la prévisibilité et de la stabilité des États, même au niveau international. Toutefois, Me Ducasse n’a pas manqué de souligner certaines exceptions, comme les traités à effets rétroactifs ou encore les normes interprétatives, qui peuvent venir bousculer ce principe.

C’est dans ce cadre rigoureux qu’il a introduit la notion de « dette historique », héritage d’une injustice passée souvent imposée dans des contextes d’oppression. En évoquant le cas haïtien, il parle sans détour de dette odieuse, rappelant que cette exigence de paiement fut imposée sous la loi du plus fort, dans une logique coloniale brutale. L’histoire de la double dette, qu’il a retracée avec précision, illustre ce legs toxique dont les répercussions se font encore sentir.

Une autre question a été soulevée avec force : « Entre rigueur juridique et exigence morale, un dilemme s’impose : faut-il privilégier la sécurité juridique ou la justice réparatrice ? » Me Ducasse a insisté : le droit n’est pas toujours juste. À preuve, le tristement célèbre Code Noir. Pour lui, il ne s’agit plus aujourd’hui de chercher une reconnaissance de cette dette, mais plutôt d’engager des mécanismes de dialogue, afin d’éviter ce qu’il appelle une brutalité juridique et de favoriser des solutions réparatrices.

La deuxième partie de la journée a laissé la place aux interventions étudiantes, brillantes et créatives. Les délégations des départements du Centre et du Sud ont livré des performances à la fois informatives et artistiques, soulignant l’impact de la dette de l’indépendance sur leurs territoires respectifs.

Les étudiants du Centre ont présenté une réflexion intitulée « À l’ombre d’une injustice historique, un avenir entravé ». Ils ont mis en lumière les richesses naturelles de leur région, ses sites touristiques, ses sources d’eau, et son économie essentiellement agricole. Leur exposé s’est conclu par des recommandations sur l’utilisation d’un éventuel fonds de restitution, en vue de stimuler le développement du département. Un morceau musical vibrant, suivi d’une chorégraphie inspirée, a magnifiquement clôturé leur intervention.

Le Sud, quant à lui, a opté pour une présentation plus théâtrale, mais tout aussi percutante. Sur fond de musique, ils ont livré une déclamation émouvante retraçant l’histoire de la dette imposée par la France. La mise en scène, alternant narration, danse et théâtre, a captivé le public, visiblement transporté par la puissance du message et la beauté de la performance. Les acclamations nourries et les ovations prolongées ont témoigné de l’impact de leur présentation.

Cette journée restera sans doute dans les mémoires comme un moment fort, où l’exigence scientifique a rencontré la force de l’expression artistique, et où l’histoire douloureuse d’un peuple a trouvé des voix nouvelles pour réclamer justice.

 

              

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